Fruit de Garcinia cambogia

Depuis les travaux d’Otto Warburg, on sait que le métabolisme des cellules cancéreuses est profondément modifié. L’approche métabolique des cancers consiste à cibler ces altérations du métabolisme afin d’augmenter l’efficacité des traitements anticancéreux.

L’extrait sec de l’écorce du fruit de Garcinia cambogia est un condiment utilisé en Asie sous forme de poudre  dans de nombreuses préparations culinaires (le curry indien par exemple). Il contient 50 à 60% d’hydroxycitrate (HCA), un  inhibiteur puissant de l’ATP Citrate Lyase (ACLY), une enzyme intervenant dans le métabolisme des lipides.

Plusieurs publications récentes ont montré que l’hydroxycitrate pouvait avoir un intérêt thérapeutique dans le cadre de l’approche métabolique du traitement des cancers.

L’ATP Citrate Lyase, une enzyme clef du métabolisme lipidique


L’ATP Citrate Lyase (ACLY) est une enzyme extra-mitochondriale indispensable à la jonction du métabolisme cellulaire des glucides et des lipides. En effet, en présence d’ATP et de coenzyme A, l’ACLY  permet de convertir le citrate en acétyl coenzyme A (acetyl-CoA) et en oxaloacétate. Cet acetyl-CoA peut ensuite être utilisé pour la synthèse de novo de lipides (cholestérol et  acides gras à longue chaine), la synthèse d’acétyl-choline dans le système nerveux, ou encore pour l’acétylation des histones (permettant au niveau du noyau l’accessibilité à l’ADN et la transcription des gènes).

ATP Citrate Lyase
From : HATZIVASSILIOU G, ZHAO F, BAUER DE, et col : ATP citrate lyase inhibition can suppress tumor cell growth. Cancer Cell, October 2005, vol 8, pp 311-321

Il a été démontré qu’ACLY était sur-exprimée dans beaucoup de tumeurs humaines (cancers du sein, de la prostate, du foie, de la vessie, du colon, de l’estomac ou encore des poumons). Cette sur-expression d’ACLY permettrait aux cellules cancéreuses de rediriger la surproduction de pyruvate (effet Warburg) vers la synthèse de novo de lipides, qui sont indispensables à la synthèse de la membrane cellulaire et donc à la croissance tumorale.

L’inhibition d’ACLY permet de réduire de façon significative la multiplication des cellules cancéreuses in vitro (HATZIVASSILIOU 2005), inhibe le développement des cellules souches cancéreuses (HANAI 2013), freine la croissance tumorale dans des modèles murins, en association avec l’acide alpha lipoïque (SCHWARTZ 2010) et inhibe la migration des cellules tumorales de glioblastomes (BECKNER 2010).

Cet effet anti-tumoral est dose-dépendant et touche principalement les cellules ayant un phénotype glycolytique : les cellules cancéreuses sont beaucoup plus sensibles à l’inhibition d’ACLY que les cellules saines ayant un taux de glycolyse plus faible. L’inhibition de la lipogénèse de novo n’est probablement pas le seul mécanisme impliqué : la réduction de l’acétylation des histones (liée à la réduction de la concentration cytosolique en acétyl-CoA) et l’inhibition de la lactate deshydrogénase (synthèse de lactate à partir de pyruvate) interviennent également pour limiter la prolifération des cellules cancéreuses.

Plusieurs inhibiteurs de l’ACLY sont actuellement étudiés pour leur utilisation potentielle  en cancérologie (ZU 2012). L’hydroxycitrate est l’inhibiteur de l’ACLY le plus facilement disponible et le plus prometteur. Il existe quatre stéréoisomères de l’hydroxycitrate, mais le (2S,3S)-2-hydroxycitrate (encore appelé 4S-HCA) présent dans l’extrait sec de G. cambogia est la forme la plus active pour inhiber l’ACLY.

Garcinia cambogia, une source naturelle d’hydroxycitrate

Fruit de Garcinia cambogia (= G. gummi gutta)
Fruit de Garcinia cambogia (= G. gummi gutta)

Actuellement, la principale source d’hydroxycitrate (HCA) est naturelle :  50 à 60% de l’extrait sec de l’écorce du fruit de Garcinia cambogia est composé de 4S-HCA, la forme la plus active d’hydroxycitrate pour inhiber l’ACLY. On en trouve également en moindre quantité dans l’écorce d’autres fruits d’arbustes de la famille des Mangoustaniers, ou dans les hibiscus (Hibiscus subdariffa).

Garcinia cambogia est un arbuste de la famille des mangoustaniers, endémique dans les forêts humides d’Indonésie et cultivé dans tout le sud-est asiatique. Les mangoustans (fruits de G. mangostana) sont consommés frais, alors que  l’écorce séchée de G. cambogia (synonyme :  G. gummi-gutta) est utilisée depuis des siècles en Asie comme condiment (dans le curry en Inde par exemple).

L’utilisation des extraits secs de  Garcinia cambogia a été très médiatisée à cause de son intérêt potentiel comme agent amaigrissant. Bien que cet effet amaigrissant n’ait pas été prouvé dans des essais cliniques randomisés, l’explosion de la commercialisation des suppléments nutritionnels contenant de l’extrait sec de Garcinia cambogia a entrainé une polémique sur son éventuelle hépatotoxicité (LOBB 2009). Des études récentes ont montré par la suite que l’utilisation de Garcinia cambogia n’est pas toxique jusqu’à des doses de 2800 mg/j chez l’homme (STOHS 2009, CHUAH 2012).

Utilisation de Garcinia cambogia en médecine vétérinaire


Aucune étude n’a pour l’instant été publiée sur l’utilisation de Garcinia cambogia chez le chien ou le chat ! Les études réalisées sur l’homme montrent que même si l’hydroxycitrate est absorbé au niveau intestinal et passe dans la circulation sanguine, la biodisponibilité de l’hydroxycitrate  est faible et de fortes doses sont nécessaires pour avoir une efficacité thérapeutique (VAN LOON 2000).

La posologie de Garcinia cambogia communément utilisée chez l’homme est de 10 à 20 mg/kg trois fois par jour. Chez les rats et les souris, des doses de 250 mg/kg deux fois par jour pendant 3 semaines ont été utilisées sans montrer d’effets secondaires significatifs (SCHWARTZ 2010). La dose idéale chez le chien et le chat doit encore être établie, mais une posologie de 10 mg/kg deux à trois fois par jour semble être un bon point de départ en médecine vétérinaire.

Bibliographie

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