Qu’est-ce qu’une tumeur,
un cancer , une métastase ?
Pour décrire le cancer, il est possible de faire une analogie entre un organisme vivant et une société civile normalement organisée avec sa croissance, son service d’ordre et ses troubles.
Dans un organisme normal, toutes les cellules communiquent entre elles et se coordonnent afin que les tissus ne se forment pas de manière anarchique. Il existe un règlement et ses lois (le code génétique) … et un service d’ordre (le système immunitaire).
Un cancer est une forme « d’anarchie cellulaire » : croissance rapide et incontrôlée de cellules ou de tissus dans le corps. Dans un organisme en bonne santé, il existe un équilibre permanent entre l’apparition de cellules cancéreuses et leur élimination soit par le système immunitaire, soit par apoptose ou autophagie. Lorsque ce fragile équilibre est rompu, un tissu anormal se développe : la tumeur (encore appelée néoplasme ou néoplasie).
Les tumeurs dites bénignes se développent lentement. Elles n’ont pas tendance à envahir ou à détruire les tissus adjacents, même si elles peuvent perturber leur fonctionnement par gêne mécanique. Les tumeurs bénignes n’ont pas la capacité essaimer et à se répandre dans tout le corps.
Les tumeurs malignes, en revanche, se développent beaucoup plus rapidement . Elles ont tendance à envahir les tissus voisins et à les détruire. Certaines cellules cancéreuses peuvent se détacher de la tumeur, passer dans les vaisseaux sanguins ou lymphatiques (emboles vasculaires) et migrer ailleurs dans l’organisme pour aller former d’autres tumeurs appelées métastases.
Les cancers sont plus fréquents
chez les chiens et les chats que l’homme ?
Contrairement ce que beaucoup de personnes imaginent, les animaux n’ont pas plus de cancers que les humains.
Le risque de développer un cancer au cours de la vie est estimé à 30% chez l’homme et à 25% chez la femme. Ce risque est évalué à 25% chez le chien et de 20% chez le chat.
Cette constatation que le risque de développer un cancer au cours de la vie est relativement homogène chez la plupart des mammifères, quelque soit leur taille et leur durée de vie moyenne, est appelé « paradoxe de Peto ».
La croyance que les chiens ou les chats ont plus de tumeurs que les humains vient du fait que les humains vivant en moyenne 75 à 80 ans et un chien ou un chat 10 à 15 ans, la fréquence des cancers sur les animaux domestiques nous semble 4 à 5 fois plus élevée que chez l’homme !
Quels sont les signes permettant
de suspecter un cancer ?
Comme les humains, les animaux de compagnie peuvent développer un cancer affectant presque tous les organes ou tissus de leur corps. Les signes (symptômes) qui peuvent être observés varient en fonction du tissu impliqué et de la gravité de la néoplasie.
Le cancer peut être visible sous la forme d’une masse anormale … comme une tumeur mammaire ou cutanée par exemple. Dès qu’une masse anormale est décelée sur votre animal, il est indispensable de demander l’avis d’un vétérinaire qui réalisera le plus souvent une cytoponction.
Parfois, ce sont des symptômes anormaux, symptômes chroniques et récidivants, qui vont faire suspecter un cancer. Consultez votre vétérinaire si vous observez l’un des signes suivants chez votre animal :
- Masse/tumeur visible
- Bosses ou décoloration de la peau
- Plaies qui ne cicatrisent pas
- Perte d’appétit ou appétit capricieux
- Abdomen gonflé
- Saignements par la bouche ou le nez
- Sang dans les selles ou les urines
- Difficultés pour respirer, toux chronique
- Diarrhée ou vomissements chroniques
- Perte de poids sans explication
- Boiterie d’origine inconnue
Bon nombre des symptômes observés avec des cancers peuvent également être observés avec des affections non néoplasiques. C’est votre vétérinaire et les examens complémentaires qui permettront de confirmer ou d’infirmer la tumeur.
Quelles sont les tumeurs les plus fréquentes
des animaux domestiques ?
Tumeurs les plus fréquentes du chien ou de la chienne :
- tumeurs des mamelles (50% tumeurs bénignes, 50% tumeurs malignes),
- tumeurs du système lymphoïde (lymphomes malins, leucémies),
- tumeurs cutanées (mastocytomes, carcinomes épidermoïdes),
- tumeurs de la cavité buccale (fibrosarcomes, mélanomes malins, carcinomes épidermoïdes),
- hémangiosarcomes de la rate, etc …
Tumeurs les plus fréquentes chez le chat :
- fibrosarcomes du tissu conjonctif sous-cutané,
- tumeurs mammaires (90% adénocarcinomes malins),
- tumeurs du système lymphoïde (lymphomes malins, leucémies),
- carcinomes épidermoïdes liés aux UV, etc …
Les NAC ont également des cancers :
- lymphomes malins chez les furets
- tumeurs mammaires chez les rats
- adénocarcinomes utérins chez la lapine, etc …
Comment diagnostique-t-on un cancer ?
Pour vérifier s’il s’agit d’un cancer, le vétérinaire va souvent réaliser des examens complémentaires : analyses de sang, radiographies, échographies, endoscopie, scanner, …..
Pour certaines masses, l’examen au microscope de cellules prélevées par cytoponction à l’aiguille fine (ou FNA pour « fine needle aspiration ») ou cytologie, peut rapidement fournir au vétérinaire une orientation diagnostique (distinction entre une tumeur et un abcès par exemple).
Dans la plupart des cas, lorsqu’une tumeur est suspectée, une biopsie (prélèvement d’un échantillon de tissu pour examen au microscope) sera nécessaire pour confirmer le diagnostic, aider à déterminer si la tumeur est bénigne ou maligne, ou encore pour identifier l’origine de la tumeur et déterminer son grading histologique (= déterminer son agressivité).
Qu’est-ce que le bilan d’extension d’une tumeur ?
Lorsqu’une tumeur est suspectée, des examens complémentaires peuvent être nécessaires pour déterminer dans quelle mesure le cancer a pu se propager ailleurs dans l’organisme (métastases).
Ces examens complémentaires font parti du bilan d’extension qui permet de déterminer le stade clinique du cancer.
Il peut s’agir de cytoponctions des noeuds lymphatiques de drainage, du foie ou de la rate.
L’échographie ou la radiographie, permettent de visualiser des nodules déjà assez gros (en général 5 à 10 mm), alors que la tomodensitométrie (scanner) met en évidence des lésions de l’ordre du millimètre. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est un examen encore peu répandu en médecine vétérinaire, mais il est très utile pour l’exploration du système nerveux.
L’endoscopie ou la coelioscopie permettent également de faire des biopsies de lésions profondes sans avoir besoin de recourir nécessairement à une intervention chirurgicale.
Causes et prévention des cancers
chez le chien et le chat ?
La cause de la plupart des tumeurs des animaux domestiques n’est pas identifiée … mais quelques cancers animaux peuvent avoir une origine extrinsèque et des mesures préventives existent.
Origine virale
Chez le chat, le virus leucémogène félin ou FeLV (Feline Leukemia Virus) peut provoquer des leucémies ou des lymphomes malins. Le FeLV se transmet de la mère aux chatons (in utero ou lors de la lactation), par les relations sexuelles, ou par les morsures. Il existe un vaccin relativement efficace contre le FeLV, mais uniquement si les chats sont vaccinés avant d’être contaminés. Comme la transmission de ce virus est souvent liée à l’activité sexuelle (coït, mise bas, mais aussi bagarres liées aux compétitions entre mâles), la stérilisation des mâles et des femelles permet de limiter la propagation du virus.
Les UV du soleil
Tout comme chez l’homme avec les mélanomes malins ou les carcinomes basocellulaires, les rayonnements UV du soleil peuvent provoquer des tumeurs sur les zones cutanées dépigmentées, parfois chez le chien, mais beaucoup plus fréquemment chez le chat. Dans l’espèce féline, les carcinomes épidermoïdes cutanés sont plus fréquents chez les chats blancs ou dans les zones peu pigmentées. Les localisations préférentielles sont la truffe (planum nasal), les paupières, l’extrémité des oreilles ou encore les tempes. La prévention passe par la limitation de l’exposition au soleil (souvent difficile !), les crèmes solaires type « écran total », mais surtout par le traitement précoce des lésions de petite taille. Les carcinomes épidermoïdes de petites taille peuvent très souvent être guéris par la chirurgie (otectomie partielle), ou l’électro-chimiothérapie (traitement plus récent, mais très efficace dans cette indication).
La stérilisation
La stérilisation réduit le risque de cancer mammaire chez les chiens et les chats. La moitié de tous les néoplasmes mammaires chez les chiens et plus de 85 % de tous les néoplasmes mammaires chez les chats sont malins, et la stérilisation des femelles avant l’âge de 12 mois réduit ce risque. La stérilisation élimine également le risque de cancer des testicules chez les mâles. À l’inverse, il existe des possibilités que la stérilisation puisse augmenter le risque de certains cancers chez certaines races ! Discutez avec votre vétérinaire des avantages, des risques et des avantages de la stérilisation de votre animal.
La génétique
Certaines races sont également plus à risque de développer un cancer et devront faire l’objet d’une vigilance accrue :
- Boxer (mastocytomes, tumeurs cérébrales, lymphomes malins),
- Bouvier Bernois (lymphomes malins, sarcomes histiocytaires),
- Bergers Belges (tumeurs de l’estomac),
- Dogues Allemands (ostéosarcomes), etc …
Peut-on traiter un cancer
chez un chien ou un chat ?
La plupart des techniques modernes utilisées en cancérologie chez l’homme sont maintenant disponibles en médecine vétérinaire : chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie, immunothérapie, traitement de la douleur, traitements palliatifs et traitement alternatifs.
Avec les progrès de la médecine vétérinaire, de plus en plus de cancers des animaux domestiques sont traitables. Même si la guérison ne pourra pas être la règle, l’amélioration de la survie avec une bonne qualité de vie est très souvent possible. La détection et le traitement le plus précocement possible sont les meilleurs moyens d’avoir de bons résultats.
Chaque type de cancer nécessite une prise en charge individuelle. Le traitement comprendra le plus souvent une combinaison de traitements tels que la chirurgie, la chimiothérapie, la radiothérapie, l’électro-chimiothérapie ou encore l’immunothérapie.
Il est important de noter que les animaux tolèrent souvent mieux la chimiothérapie que les humains.
Une prise en charge globale ou holistique (notion de médecine intégrative) de l’animal cancéreux, associant traitements conventionnels et traitements alternatifs et complémentaires (phytothérapie, aromathérapie, alimentation et nutrithérapie, approche métabolique des cancers, etc …) aidera votre animal à mieux répondre au traitement.
La gestion de la douleur est également un aspect très important du traitement des cancers. Actuellement, de nombreuses molécules antalgiques sont accessibles aux vétérinaires pour soulager au mieux les douleurs cancéreuses :
- morphiniques injectables en per et post-opératoire,
- protocoles de perfusion continue type MLK (morphine / lidocaïne / kétamine)
- protocoles d’analgésie balancée associant AINS, morphiniques, …
- patchs de fentanyl,
- etc …
Une fois que le diagnostic sera établi, le vétérinaire discutera de la ou des meilleures options de traitement pour votre animal et des risques et effets secondaires associés à chaque option.
Certains types de cancers peuvent être guéris, mais d’autres types ne peuvent être que gérés au mieux pour freiner la propagation de la tumeur et prolonger la vie de votre animal avec la meilleure qualité de vie possible. Souvent, les principaux facteurs déterminant le succès du traitement sont :
- la taille de la tumeur et sa rapidité d’évolution
- la nature histologique de la tumeur et son grading histologique
- l’extension de la tumeur ou stade clinique, déterminé par le bilan d’extension
- les possibilités de traitement
- l’état général de l’animal avant de commencer le traitement
Quel est le taux de réussite ?
Le pronostic et la réponse au traitement est très variable. Cela dépend du type et de l’étendue de la néoplasie, ainsi que de la disponibilité et de l’efficacité du traitement. Il n’y a pas de règle générale concernant la réponse d’un animal individuel au traitement, mais seulement des indications basées sur les publications et l’expérience personnelle du vétérinaire oncologue.
Les tumeurs bénignes sont généralement plus faciles à traiter. Cependant, même une tumeur bénigne peut être délicate à traiter, malgré l’absence de métastases. Par exemple, certaines tumeurs bénignes de la cavité buccale (comme les épulis acanthomateux), nécessitent un traitement agressif associant chirurgie et radiothérapie pour espérer obtenir une guérison complète.
Un traitement anti-cancéreux a beaucoup plus de chances de réussir si les tumeurs sont détectées précocement.
Seule une consultation avec un vétérinaire oncologue pourra préciser le pronostic d’une tumeur en fonction des différentes options thérapeutiques.